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Do you speak hindi?

di Raphaëlle Rérolle - 29/03/2007

Fonte: pbmstoria

La lingua è una delle acquisizioni culturali che più si radicano nell’individuo, condizionando la sua identità e la sua appartenenza ad una comunità.
In occasione del Salone del libro di Parigi, dedicato all’India, “Le Monde” dedica interamente il suo supplemento settimanale alla cultura e alla storia del grande paese asiatico.
L’India, con le sue 22 lingue nazionali e i suoi 400 dialetti costituisce un laboratorio fondamentale per comprendere le dinamiche che si instaurano fra lingua e identità. A questa grande varietà linguistica si contrappone l’uso dell’inglese come lingua veicolare. Adottato in seguito alla colonizzazione britannica, l’inglese deve il suo successo alla mondializzazione. In India, esso è anche usato per marcare una differenziazione sociale.
L’articolo, attraverso l’opinione di numerosi scrittori, riflette sui mutamenti culturali e sul ruolo della lingua nella società indiana.


Le Monde - 23 marzo 2007

[...] Fondée par Nehru sur le modèle de l’Académie française, la Sahitya Akademi est une institution qui cherche à encourager la littérature en langues indiennes. Conférences, publications (de livres, mais aussi de dictionnaires et de grammaires comparées) et traductions d’une langue à l’autre, l’académie présidée par Gopi Chand Narang veut, dit-il, favoriser le “trafic” entre les idiomes. Avec un budget de 120 millions de roupies par an (environ 2 millions d’euros), la Sahitya attribue aussi des prix littéraires et de traduction. Seulement, quelle langue parleront-ils, une fois que l’atmosphère se dégèlera ? Dans les tractations préliminaires, la question a forcément été évoquée - c’est une mention qui figure en bonne place dans les annonces matrimoniales. Avec 22 langues nationales (plus l’anglais) et plus de 400 dialectes, l’Inde est riche d’une diversité propre à donner le tournis, mais aussi à compliquer les stratégies amoureuses! Passé les premières minutes de flottement, dans la salle tranquille de l’Embassy, la situation se résout donc à l’indienne, si l’on peut dire: les pères s’adressent la parole en anglais, les mères en hindi et les tourtereaux présumés dans un mélange curieux, passant de l’un à l’autre au fil de la conversation languissante.
Compliquée, surprenante pour un Occidental, formidablement intriquée, la question des langues est lourde de conséquences et pas seulement pour la recherche d’un conjoint. Dans le domaine littéraire encore plus qu’ailleurs, ce problème se pose à tous les auteurs: en fonction de l’idiome dans lequel ils sont publiés, les écrivains connaîtront des destins souvent très différents. A ceux qui ont pu choisir l’anglais, langue du colonisateur, mais aussi de la mondialisation (parlée de façon courante par moins de 4 % de la population), les bénéfices d’une possible ouverture vers l’extérieur. “L’anglais est la langue de la mobilité sociale et du prestige”, explique Urvashi Butalia, éditrice et auteur d’un passionnant ouvrage intitulé Les Voix de la partition (Actes Sud, 2002). Aux autres, ceux qui écrivent en malayalam, en hindi, en bengali, en tamoul ou en ourdou, le relatif isolement des auteurs dits “vernaculaires”, qui auront toutes les peines du monde à se faire traduire non seulement dans les grandes langues étrangères, mais aussi dans les autres idiomes de leur propre pays.
“On vit encore dans l’ombre de l’anglais”, se désole Pavan K. Varma, essayiste, auteur du Défi indien et directeur de l’ICCR, équivalent de l’Alliance française en Inde. “C’est la langue des élites, qui sont elles-mêmes écartées de leur culture d’origine, pourtant très riche et très complexe. Une langue d’exclusion. Parfois, vous parlez en hindi à quelqu’un qui vous répond en anglais, pour bien montrer qu’il peut le faire!” Dans son grand bureau précédé par un couloir typique de l’administration indienne (carreaux mouchetés par terre et néons bleuâtres au plafond), ce fonctionnaire du ministère des affaires étrangères a pour sa part éliminé le costume cravate, au profit de la veste à col boutonné. “La langue n’est pas une question de confort, martèle-t-il. Il faut se réapproprier notre espace culturel.”

“TROP MÉLO”
Oui, mais comment résister à aux bénéfices économiques et aux ouvertures offerts par l’anglais ? Cramponné à son téléphone, pour suivre le bouclage du dernier numéro du quotidien anglophone “Hindustan Times”, dont il est l’éditorialiste, le romancier Indrajit Hazra s’est confronté au problème. D’une famille bengalie, l’auteur du roman intitulé Le Jardin des délices terrestres (Le Cherche Midi, 2006 et Le Livre de poche) a choisi l’anglais pour sa “malléabilité”, jurant qu’il n’est pas bon écrivain dans la langue de ses parents : “Trop mélo”, sourit-il. Mais, dans la mesure où il écrit en anglais, il ne s’adresse pas ou peu à un public situé à l’intérieur de l’Inde. Or, explique-t-il, “le marché anglo-saxon a tendance à attendre que nous soyons un peu des ambassadeurs de notre pays. Que nous fassions dans l’exotisme. Et nous sommes fatigués de ça : si vous voulez en savoir plus sur l’Inde, ne lisez pas mes livres!”
A l’inverse, le fait d’écrire en anglais permet de dire des choses (sur le sexe, par exemple) qui ne seraient pas admises par un lectorat en langues indiennes, comme le reconnaît le romancier Upamayu Chatterjee.
Même quand ils optent pour l’anglais, les romanciers sont porteurs d’un double bagage. “Le bengali est ma première langue, remarque Indrajit Hazra. Si vous me donnez un coup de pied, c’est en bengali que je crierai. Et il arrive que je pense dans cette langue, avant d’écrire en anglais.” Ravi Shankhar Etteth, lui, parle et écrit parfaitement le malayalam. L’auteur du polar La Couleur du deuil (Liana Levi) soutient que toute la partie sensuelle de son écriture vient du malayalam, en particulier les impressions visuelles. Il lui arrive d’ailleurs de rédiger des nouvelles dans cette langue, mais l’anglais lui est très “confortable”. N’a-t-il pas été élevé au milieu de la porcelaine anglaise ? Et puis, écrire en malayalam serait un acte politique et cet auteur ne veut absolument pas paraître soutenir les autorités communistes du Kerala, sa région natale.
Certains choisissent cependant les langues indiennes - ou sont choisis par elles. Quelques-uns, comme Nirmal Verma ou Krishna Sobti, sont parvenus à en vivre. D’autres, non. Ainsi du poète hindiphone Ashok Vajpeyi (éd. Caractères), qui parle pourtant l’anglais avec un magnifique accent de Cambridge. “Je ne rêve pas en anglais, dit-il, et ma petite enfance n’a pas été bercée par l’anglais. Comment pourrais-je écrire de la poésie dans cette langue?”